Il n'est plus temps de s'interroger sur l'opportunité ou non.- d'introduire
le silure dans les eaux vosgiennes, car le plus gros poisson d'eau douce,
après l'esturgeon Béluga, a déjà fait son trou.
Et encore moins de stigmatiser son appétit glouton.
Personne n'a jamais apporté des preuves tangibles des méfaits
dont on l'accuse à tort depuis des siècles.
Pourtant sa présence ne laisse pas insensible les populations. Il inspire
sinon la crainte du moins une certaine méfiance.
En Hongrie,mais aussi dans l'ex-URSS,son berceau d'origine, des légendes
relatent la disparition de jeunes gens happés
par ce " monstre sanguinaire " sur les bords du Danube. La Dniepr,
le deuxième plus grand fleuve européen
derrière la Volga revendique par ailleurs la capture d'un spécimen
record, homologué (le détail à son importance),
de 306 kg et 5 m ! Il n'en fallait pas davantage pour déchaîner
l'imaginaire collectif.
Tout s'explique !En France, Brigitte Bardot,la grande prêtresse de la
cause animale, s'était émue de la disparition d'animaux
de compagnie (genre sa-cisses sur pattes) qui avaient eu l'imprudence de patauger
dans les plans d'eau du boisde Vincennes.
Fustigeant e tpropulsant le silure au rang d'ennemi public numéro un.
Dans le même registre, les Vosgiens n'ont pas oublié la mésaventure
survenue à un jeune baigneur romarimontain en juillet 2000 dans le
plan d'eau qui borde laquatre voies. Bilan ? Un orteil égratigné
et une belle frayeur.
Aujourd'hui encore,il n'est d'ailleurs pas certain qu'un silure soit le responsable
de ce petit désordre estival.
Ces deux .anecdotes permettent cependant de mieux cerner les véritables
murs de ce géant.
Doté d'une puissante mâchoire, il doit cependant composer avec
un armement comparable à celui d'une râpe à bois.
C'est dire si son champ de prédation reste limité.
Poissons et crustacés, qu'il détecte grâce à un
sens olfactif 100.000 fois supérieur à celui de l'être
humain, composent
l'essentiel de son ali-mentation. Mais à l'occasion, il ne dédaigne
pas happer un canard ou une poule d'eau.Imitant fort bien en cela
les gros brochets, cela n'a rien de très exceptionnel !Sa première
apparition dans le département remonte à1996,
à la faveur d'une capture aussi spectaculaire qu'inattendue pour son
auteur (un garçon d'une dizained'années)
dans le plan d.'eau de la cité Barrés à Charmes.
Depuis, l'imprudence de pisciculteurs et la malveillance d'une poignée
d'apprentis sorciers ont contribué à élargir prématurément
sa zone de répartition. On le retrouve aujourd'hui, dans de très
nombreux plans d'eau et dans les principaux cours d'eau
du département : Madon, Moselle, et dans la partie aval au moins de
la Meuse et du Madon.
Si sa présence demeure encore anecdotique,il se reproduit et devrait
finir dans un biotope à sa convenance à atteindre une taille
respectable.
Dans le Madon, lequel compte des fosses à plus de quinze mètres
et qui abrite une importante population de cyprinidés : brèmes,
tanches, carpeaux et gardon, sans oublier une population d'anguilles (dont
le silure glane raffole) non négligeable,
peut-être pourra-t-il atteindre 2,50 m avant la fin de la décennie
pour un poids compris entre60 et 75 kilos.
Pêcheurs sportifs à vos cannes !
J.-L. THOMAS-DOBBOZ
Petit à petit , le silure s'installe dans l'Yonne
Il est laid, peut atteindre des dimensions monstrueuses, est paré de tous les vices : après avoir colonisé des rivières de la Bourgogne du sud, le silure glane fait son nid dans lYonne. La bête nest pourtant quune nouvelle victime de la rumeur. Présentation dun poisson qui fera son entrée dans le concours de pêche sportive de lYonne Républicaine dés 2002.
Victime dune réputation souvent légendaire, le silure, poisson originaire dEurope orientale, déclenche depuis des siècles craintes et passions. Avant les grandes glaciations de lére quaternaire, le silure peuplait déjà le bassin de ce qui allait devenir bien plus tard le Rhône. Durant cette période, il se réfugie dans le bassin du Danube pour ne réapparaître sur le territoire français quau XIXe siècle, à la suite dintroductions dans des cours deau comme le Doubs ou la Seille, deux affluents de la Saône.
Aujourdhui, grâce à ses remarquables capacités dadaptation, le silure glane (silurus glanis), seule espèce recensée en France, est un poisson acclimaté et en pleine expansion. On le localise principalement dans les bassins du Rhin, du Rhône, de la Loire et de la Seine, ainsi que dans de nombreux plans deau.
« Requin deau douce »
Dans certaines légendes, le silure est comparé à un monstre, une espèce de « baleine », voire de « requin deau douce », capable dattaquer pêle-mêle les chiens, les enfants, les jeunes filles Le poisson doit cette injuste renommée à des récits effrayants et grandement exagérés, datant du Moyen Age. Au cours des grandes épidémies de peste, les cadavres, faute de moyens et de temps pour donner des sépultures décentes, étaient souvent jetés dans les fleuves et les rivières. On trouva ainsi dans le ventre de silures capturés, des membres humains, des doigts féminins ornés dalliance de jeune mariée De surcroît, la bestiole, avec sa tête plate, son corps allongé et ses grands barbillons, est laide. Ainsi naissent les mauvaises réputations. Les naturalistes du XIXe siècle iront même jusquà le surnommer « Le Mal », en raison de sa voracité et de son aptitude à vivre au plus profond des trous ténébreux. Le silure mérite pourtant meilleure attention.
Il colonise les grandes fosses dans lesquelles il aime se retrouver en compagnie
de ses congénères au cours des périodes dinactivité.
Poisson lucifuge (il naime pas la lumière), il part chasser seul
à la nuit tombée.
La reproduction a lieu de nuit, de mai à juin, le long des rives, lorsque
la température de leau atteint les 18° C. La femelle peut
pondre jusquà 50 000 ufs par kg, dans un nid composé
la plupart du temps de végétaux et de branches mortes que le
mâle défend vigoureusement.
Le silure sadapte à son environnement
A sa naissance, le silure mesure 7 mm. Il atteint 80 cm à 3/4 ans, 140 cm à 9 ans et 160 cm à 12 ans. Son espérance de vie avoisine les 20 ans. Dans nos eaux, les plus gros sujets capturés dépassent les 250 cm pour un poids denviron 100 kg. Son alimentation varie au gré de sa croissance. Planctonophage lorsquil est alevin, silurus glanis ne devient ichtyophage (il se nourrit principalement de poissons) quà partir de sa deuxième année. Il traque alors de préférence les deux ou trois espèces les mieux représentées dans le milieu : les brèmes, les tanches, les poissons-chats, mais aussi les batraciens, les crustacés, les mollusques et, plus occasionnellement les oiseaux aquatiques et les rongeurs.
Très opportuniste, le silure adapte son alimentation aux ressources
disponibles dans son habitat. Sa consommation varie également en fonction
de la température ; Ainsi, à lautomne, il vit en état
de léthargie, puis cesse de se nourrir dès que la température
de leau descend sous les 12°C.
Contrairement à certains poissons comme le sandre, le silure tue uniquement
pour se nourrir. Des études conduites simultanément sur différents
carnassiers démontrent que le silure glane interfère peu avec
ceux-ci au stade adulte tant que la ressource alimentaire ne savère
pas être un facteur limitant.
Toutefois, à son stade juvénile, il entre en compétition avec le sandre, en puisant dans le même potentiel aux mêmes endroits. Sa ration séchelonne de 1,7 à 2,2 kg par kg de silure, alors quelle est de 3,4 pour le brochet et de 2,2 pour le sandre. La bête na donc rien dune « requin deau douce ».
Légende photo : Dans certaines légendes, le silure est comparé à un monstre. (Dessin D. Brunet. ADAPRA.)
Cédric MENGUAL
03.12.2001
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La pêche du silure, de la cuillère au gros vif
Les mois entre juin et octobre sont les plus propices à la capture
du silure. La prospection doit se faire de manière générale,
dans les secteurs où la hauteur deau est nettement supérieure
à la profondeur moyenne de la rivière. Les fosses et les piles
de pont sont des endroits privilégiés. Selon les spécialistes
de sa pêche, luilisation de leurres tels que les cuillères
tournantes ou ondulantes permet de capturer les plus gros spécimens.
Cependant, le poisson apprend rapidement à sen méfier.
Les captures sont plus régulières, mais de moindre taille, en pêchant au vif. Une brème vigoureuse, de 200 g à 1 kg, séduira le silure en action de chasse. Le mort manié réserve également dagréables surprises et semploie lorsque le carnassier devient méfiant. La technique du clonk, morceau de bois utilisé pour taper à la surface de leau afin dexciter le silure, est préconisé en dernier recours. Il ne faut pas abuser de ce joker pour ne pas leffrayer.
Le silure sinstalle lentement dans lYonne
Il est difficile détablir un état des lieux précis de la présence du silure dans les cours deau icaunais. Seule certitude, lanimal progresse dans le sud du département. Des secteurs sur lYonne ont déjà acquis une belle réputation, au niveau de Cézy ou de Saint-Julien-du-Sault. Actuellement, on peut le localiser sur un tronçon situé entre Villeneuve-le-Guyard et Joigny. Des prises ponctuelles, enregistrées par exemple à Auxerre ou à Vincelles, laissent supposer sa colonisation encore plus en amont. Il convient cependant dexploiter ces dernières données avec prudence.
La plupart des silures capturés mesurent entre 60 et 100 cm, les plus
gros recensés atteignent 140 cm. La création dune catégorie
« silure » dans le concours de lYonne Républicaine
réservera sans doute de grosses surprises.
Aout 2002
Silure : un géant glouton
Ce faux dur, bien loin des forfaits qu'on lui impute depuis
des siècles, est désormais présent dans les eaux vosgiennes.